En Belgique, chaque année, plus de 20 000 marchés publics sont attribués. Il s’agit des contrats passés par les administrations publiques, communes, provinces, intercommunales ( et autres personnes morales de droit public) avec des entreprises pour réaliser des travaux, des achats, des prestations. Cela représente une valeur estimée d’environ 60 milliards d’euros, soit environ 10 à 15 % du PNB.
Autant de milliards qui doivent prioritairement soutenir la relocalisation de notre économie et la transition écologique et solidaire de notre pays.
Conclure un marché public implique de respecter une réglementation complexe. Dans la pratique, les contraintes sont fortes, tant pour les soumissionnaires que pour les pouvoirs adjudicateurs. Mais les règles existent aussi pour garantir une égalité entre les acteurs et éviter les abus auxquels on a trop souvent assisté. Comment rendre tout cela plus fluide, sans diminuer nos exigences ?
Nous évaluerons ces aspects au Sénat ces prochains mois, à la l’initiative du MR, dans le but d’établir différentes recommandations.
A l’entame des travaux, j’ai précisé 5 attentes des écologistes :
- L’exemplarité et la transparence
La commande publique représente un levier ÉNORME pour la transition et la relocalisation de l’économie, les pouvoirs publics se doivent ainsi d’être exemplaires dans ce domaine.
Dans un souci de lutte contre la corruption, cette exemplarité des marchés publics doit aussi passer par une transparence totale dans leur attribution, en ce compris la question de la sous-traitance. C’est une question centrale pour renforcer le contrat de confiance entre citoyen·ne·s et pouvoirs publics. - Le juste coût environnemental et social
Au-delà du seul critère du prix, d’autres critères doivent pouvoir être valorisés auprès des organismes publics. Il s’agit du rapport qualité/prix, qui permet de prendre en compte des aspects qualitatifs, environnementaux et sociaux. Mais il peut aussi s’agir du critère « coût », constitué du prix mais également d’autres coûts économiques liés au cycle de vie, dont ceux liés à la fin de vie (élimination, collecte, recyclage… ) ou imputés aux externalités environnementales (émissions polluantes…).
Ainsi, il faudrait évaluer les dispositions légales relatives à l’intégration de clauses éthiques, sociales et environnementales. Il est pratiquement certain qu’elles restent lettre morte dans beaucoup de cas. Ces clauses doivent être appliquées à davantage de marchés publics, avec l’inclusion d’objectifs régulièrement renouvelés en termes de pourcentage de marchés publics qui répondent à ces critères. - Une place de choix pour l’économie sociale
Trop peu représentée dans l’attribution des marchés publics, et absente dans la proposition du MR, l’économie sociale représente 18 000 entreprises en Belgique, soit 12 % de l’emploi, qui œuvrent à l’avènement d’une société plus cohérente, inclusive et durable. Par exemple, il serait utile de plus fréquemment avoir la possibilité de réserver des marchés à des opérateurs économiques dont l’objectif est l’intégration sociale et professionnelle de personnes exclues du marché du travail. Un répertoire des entreprises d’économie sociale pourrait être consultable pour les marchés publics. On pourrait aussi imaginer d’intégrer dans les short lists des entreprises d’économie sociale afin de leur permettre de se positionner dans les petits marchés, ceux concernés par la procédure négociée sans publicité. - La formation et l’expertise
La formation et le soutien, spécifiquement des pouvoirs locaux, doit encore être renforcée. La capacité des pouvoirs locaux à engager leurs ressources budgétaires – et donc à se mettre en projet et en transition ! – dépend directement de leur capacité à lancer efficacement des marchés publics. Il pourrait être intéressant de mettre en place des équipes de spécialistes, mutualisées entre administrations; ainsi que de l’accompagnement et du coaching. - La praticabilité
C’est une évidence, mais ça va parfois mieux en formulant les évidences : les recommandations du Sénat pour améliorer les procédures de marché public devront apporter une plus-value tenant compte de nos balises exprimées, ET être réalistes afin d’en faciliter la mise en pratique par les différents opérateurs. Ce n’est pas assez le cas aujourd’hui.
Les procédures de marchés publics méritent d’être évaluées. Des recommandations en vue d’améliorer la situation aujourd’hui complexe pourraient utilement être formulées au Sénat. Pour que les marchés publics, qui sont des outils économiques stratégiques, jouent pleinement leur rôle pour répondre aux enjeux sociaux et environnementaux.
Plus d’informations ici : https://www.senate.be/www/?MIval=/index_senate&MENUID=51000&LANG=fr&PAGE=/event/20211012_plenary-session-2/20211012_plenary-session-2_fr.html