Egalité salariale, l’atteindre avant 2066 ?
Après plusieurs séances de travail, le Comité d’avis pour l’égalité entre les femmes et les hommes du Sénat a adopté à l’unanimité des recommandations concernant l’égalité salariale entre les femmes et les hommes.
En tant que rapporteuse, je suis fière de voir ce travail de recommandations aboutir, et ainsi soutenir toutes les actions qui amèneront plus d’égalité entre les femmes et les hommes sur le plan économique.
Nous avons entendu, ces quatre derniers mois, des expert.e.s témoigner de l’état et des causes de l’écart salarial en Belgique.
Le constat est sans appel : Les efforts actuels des pouvoirs publics ne suffisent pas. L’écart salarial s’est réduit au cours des vingt dernières années mais la situation observée ressemble plutôt à un plateau, et les inégalités persistent. A réduction équivalente, nous dit le rapport Culture of Equal 2020, l’égalité salariale pourrait être atteinte … en 2066 !
Un travail important sur la transparence des salaires, et l’accompagnement des entreprises vers l’égalité salariale doit impérativement être réalisé pour garantir aux femmes et aux hommes, à travail égal, un salaire égal. Un projet de directive européenne sur la transparence financière vient d’être présenté en ce sens, et devrait être discuté prochainement.
Mais, la question est plus large que l’importance de travailler à salaire égal. Car l’écart salarial entre les femmes et les hommes réside aussi dans les catégories d’emplois qui sont occupés majoritairement par les femmes, qui plus est à temps partiel. C’est en effet le temps partiel qui explique largement l’écart salarial sur base annuelle. En Belgique, 44% des femmes travaillent à temps partiel contre 11% des hommes, et dans des secteurs où l’emploi est peu rémunéré ( distribution, alimentation, nettoyage, soins de santé, services aux personnes…). Mais à peine 10% des temps partiels seraient librement choisis.
A côté des recommandations sur une meilleure application de la Loi de 2012 visant à lutter contre l’écart salarial, le Sénat recommande aussi de davantage tenir compte de :
1/ la valeur à accorder au travail des femmes
Par exemple, il faudrait :
Élargir les catégories d’emploi concernées par la pénibilité au travail et les ouvrir aux temps partiels.
Elargir la prise en compte des critères qui caractérisent le travail (les qualifications, les connaissances, l’expérience, les compétences requises, la technicité, la complexité, les responsabilités engagées, et la charge, qu’elle soit physique, mentale ou émotionnelle,…)
Revaloriser les métiers exercés aujourd’hui majoritairement par les femmes.
2/ l’équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle
Il y clairement un lien entre temps partiel,répartition inégalitaire du travail domestique et rôles genrés. Aux tâches familiales et au soin et à l’éducation des enfants, les femmes consacrent onze heures hebdomadaires de plus que les hommes. Au final, elles ont une charge plus importante que celles des hommes qui consacrent sept heures de plus à un travail qui lui, est rémunéré. C’est là encore un autre cercle vicieux qui emprisonne les femmes, qui, travaillant souvent à temps partiel, disposent « de plus de temps » et par conséquent s’acquittent plus de ces mêmes tâches domestiques.
3/ l’orientation professionnelle, et plus largement les représentations sur le marché de l’emploi ou dans la société en général
µNotre société devrait favoriser l’égalité dès la petite enfance, en favorisant la présence des hommes là où ils ne vont pas, et celle des femmes là où on n’en veut pas.
Parler d’argent reste un sujet tabou dans notre société, mais la transparence et la parole à ce sujet comme pour tant d’autres, est une clé de réussite du changement. Parler d’égalité salariale entre les femmes et les hommes, c’est parler d’une égalité économique. Et sans égalité économique, on ne peut pas prétendre à une égalité politique, sociale.
Les recommandations sont disponibles ici : ( je vous mets le lien dès que le document est en ligne sur le site du Sénat).
Le dossier est disponible dans son intégralité ici (dont les auditions d’experts)
Le rapport sur l’écart salarial de IEFH 2021.